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Bruno Derrien, une carrière en 10 questions

Ancien arbitre international, Bruno Derrien a exercé pendant plus de dix ans au haut niveau. S’il a remisé la tunique noire/jaune en 2007, il conserve un œil avisé et éclairé sur le milieu du football. Consultant télé et radio, mais aussi écrivain sulfureux*, il revient pour Passe D sur les événements qui ont marqué sa carrière.

 

Interview exclusive de Bruno Derrien,
(ex-)arbitre au franc parler

 

Les meilleurs moments vécus au sifflet ?

Toutes mes premières, notamment ma première finale de Coupe de France, entre Auxerre et Sedan, en 2005, au Stade de France. C’était le dernier match de Guy Roux à la tête de l’AJA, c’était un moment particulier. Ou encore mon premier match au Vélodrome, OM-Sochaux, en mai 1996.

 

Le pire souvenir ?

Le match entre Bordeaux et Lyon, en 2005 [trois mains lyonnaises non sifflées dans la surface, NDLR]. C’est la rencontre qui a ruiné ma carrière. À la suite de ça, j’ai été rétrogradé. C’est le pire moment de ma carrière, plus encore que le match entre Lens et l’OM [Marseille est éliminé aux TAB après l’invalidation d’un tir qui avait pourtant franchi la ligne, NDLR], après lequel j’avais pourtant été suspendu…

 

L’anecdote la plus sympa ?

À la fin d’un Nice-Sedan, en 2005, en 8e de finale de Coupe de la Ligue [2-0 pour les Aiglons, NDLR], Cyril Rool, qui avait d’ailleurs marqué ce jour-là, m’a offert son maillot. La stratégie des équipes adverses était souvent la même avec lui ; le faire déraper. Pendant tout le match, je l’avais encouragé, je lui parlais beaucoup et il s’était bien comporté. Au coup de sifflet final, il est venu vers moi spontanément et m’a donné son maillot, sans que je lui demande quoi que ce soit. C’était très sympa de sa part.

 

L’entraîneur le plus pénible ?

J’étais 4e arbitre lors d’un match entre le Celtic Glasgow et le Celta Vigo, en 2002 [16e de finale de Coupe UEFA, le 28 novembre 2002, NDLR]. Sur le bord du terrain, Martin O’Neill, l’entraîneur irlandais du Celtic, était très énervé. Il sautait partout et gesticulait dans tous les sens. Monsieur Colombo, qui était l’arbitre central, l’avait d’ailleurs expulsé. À la suite de ça et de notre rapport, nous avions tous été convoqués à Nyon, au siège de l’UEFA. O’Neill y compris !

 

Le plus beau but vu de la pelouse ?

Le but de Johan Micoud face à Toulouse [TFC-Bordeaux 0-3, 3 avril 1999, NDLR]. Une magnifique frappe lobée de 30 mètres. Je suis juste à côté de Micoud quand il tire, je vois le ballon partir et je sais que c’est dedans avant même qu’il ne rentre. Vraiment un très beau but. En direct, comme ça, on est admiratif d’un si beau geste.

 

Le stade où l’ambiance est la plus intimidante ?

J’ai arbitré plusieurs matchs dans de superbes stades, avec des ambiances magnifiques. Les plus chauds étaient déjà, à l’époque, un peu les mêmes qu’aujourd’hui : Marseille, Saint-Étienne, Lens, Milan, Glasgow. Ce sont des stades qui portent leurs joueurs, ils transcendent l’équipe.

 

La prise de tête qui finit mal ?

L’agression de Philippe Sirvent, en 1996, lors d’un match de D2 entre Mulhouse et Niort. Après un deuxième jaune et donc un carton rouge, Philippe Sirvent m’a bousculé violemment. Il a pris quatre mois de suspension pour ce geste. Je l’ai recroisé en 2009 à l’occasion d’un match d’anciens. Je ne l’avais pas reconnu mais lui oui. Et c’était un peu frais…

 

Le joueur que vous n’auriez pas aimé diriger ?

Peut-être Ibrahimovic. Il a l’air d’avoir une très forte personnalité. Il doit être compliqué à arbitrer, à gérer, il joue tout en puissance. Il est beaucoup dans le rapport de force avec les arbitres.

 

La règle d’arbitrage la plus stupide ?

Le carton jaune quand le joueur enlève son maillot pour célébrer un but ! Également la différence de sanction quand un défenseur met la main pour sauver un but, carton rouge, et quand un attaquant fait de même pour marquer, il ne prend qu’un jaune. La sanction devrait être la même dans les deux cas.

 

Le meilleur sifflet du football ?

Je n’ai pas vraiment de référence absolue, d’idole, comme arbitre. Néanmoins il y en avait forcément que j’appréciais. C’est compliqué d’en ressortir un seul. Il y a eu quelques fortes personnalités qui ont marqué l’arbitrage. Georges Konrath, Robert Wurtz, Joël Quiniou avaient le sens du jeu, la compréhension des situations et savaient les analyser rapidement. Actuellement, j’aime beaucoup l’arbitre allemand Felix Brych, un des meilleurs d’Europe selon moi.

 

(*) Notamment à travers ses ouvrages À bas l’arbitre ou encore SOS arbitre SOS vidéo.

 

 

© Twitter brunoderrien – éditions du Rocher/Fnac.com